Histoire

Fin XVIè – 1590. Des écrits dont les sources ne sont pas vérifiables attribuent la paternité du serpent dans sa forme « serpent d’église » et dans ses proportions à un chanoine d’Auxerre (France) nommé  Edmé Guillaume. Pourtant dans la même période on trouve du côté italien des Alpes des instruments assez similaires qui auraient peut-être inspiré le chanoine ou d’autres personnes.

XVIIè.Le serpent est très présent dans l’iconographie et déjà représenté sous forme actuelle. On trouve des contrats d’engagement pour des serpentistes dans de nombreuses institutions religieuses, telles que Notre-Dame des Doms à Avignon (1602), Saint-Agricol d’Avignon (1613), Saint-Nazaire de Béziers (1627), Troyes (1643), Sainte-Chapelle de Paris (1651), Chartres (1655)…
Sa fonction principale est l’accompagnement durant les offices du plain-chant parmi les chantres ou dans le continuo des ensembles instrumentaux d’églises.

Le serpent rentre dans l’enseignement officiel des chantres à la Chapelle Royale de Versailles en 1664.

XVIIIè. Lors des campagnes militaires qui balayent l’Europe (1700), les orchestres se croisent et s’influencent. Il se structurent aussi et confient le registre grave au serpent alors seule basse à vent disponible avec le basson et le trombone basse. Ainsi on le retrouve notamment dans les Gardes Françaises (France, 1765), Hanoverian Band (Royaume-Uni, 1785)…
De cette nouvelle utilisation, l’instrument évolue techniquement ; il s’allonge pour plus d’ergonomie et de projection du son et se dote de clefs pour plus de stabilité en jeux forté.

Son enseignement se poursuit après la révolution française au sein du Conservatoire de Paris dans le but d’alimenter en serpentistes les nombreux orchestres d’harmonie naissants (militaires et républicains), mais aussi d’améliorer sa pratique à l’église.

Il intègre alors l’orchestre toujours aux côtés des bassons et se fait entendre dans les œuvres telles que Royal Fireworks (Händel, 1749), Divertimento St. Antoni (Haydn, circa 1780), March for the Prince of Wales (Haydn, 1792)…

XIXè. On constate un étrange mélange entre d’un côté la volonté de faire évoluer la facture du serpent, de promouvoir son enseignement, et de l’autre des discours virulents de la part de musiciens célèbres tels que Berlioz pour le faire « disparaitre », tout en continuant à lui donner des parties orchestrales.

Le fait est que le rôle du serpent va diminuer progressivement dans un orchestre romantique sans cesse grandissant où la course au volume et aux graves dépasse les limites de l’instrument. Il évolue, se transforme pour tenter de suivre cette évolution (plus de clefs, de forme, abandon du bois pour le cuivre) et devient l’ophicléide (du grec « serpent à clefs »). Mais la course aux grave continue et quand le tuba contrebasse arrive avec toute la famille des saxhorns, l’ophicléide cèdera sa place.

Malgré tout, le serpent et l’ophicléide restent étonnement présents dans certaine paroisses jusqu’à la fin du siècle.

XXè – 1970. Le serpent renaît en Angleterre grâce à l’enthousiasme de Christopher Monk qui fabrique alors ses propres instruments. Son travail pour faire accepter l’instrument est considérable et particulièrement apprécié dans les pays anglophone ; il fonde le légendaire et excentrique « London Serpent trio »

Quelques années plus tard de l’autre côté de la Manche, c’est Bernard Fourtet, spécialiste des instruments anciens, et Michel Godard, musicien de jazz, qui impulsent une nouvelle approche de l’instrument tant du côté des sonorités que de l’ouverture à de nouveaux répertoires. Ils mettent en place des formations et lancent alors une nouvelle filiation de jeunes serpentistes.

Après une période de rupture d’un siècle, le serpent reprend alors sa place au sein des ensembles baroques et pré-romantiques et se lance vers les musique actuelles, appuyé par une facture instrumentales exigeante.